BIENTOT: Une Régie du chanvre Suisse ? De la France conservatrice à la Hollande lilbérale

 

 


Dépénalisation de la fumette En Europe, c'est le règne de la cacophonie
BERNE : DÉPÉNALISATION DE LA FUMETTE

Bientôt une régie fédérale du cannabis?

Comment les autorités garderont un oeil sur le marché.

CHRISTIAN BERNET

 

 

 

Les autorités veulent contrôler le marché et la qualité des produits, une manière d'en restreindre l'accès aux jeunes, dans un pays qui consomme 100 tonnes de drogues douces par année./Photo: ARC.

Le Conseil fédéral a l'habitude des petits pas en matière de drogue. Mais lundi, il a sauté sur un trampoline qui pourrait le mener loin. En annonçant sa volonté de dépénaliser la consommation du cannabis, il ouvre en effet la porte à un contrôle de la production et du commerce du chanvre. Se dirige-t-on vers une régie fédérale du cannabis? On n'en est pas loin, même si Berne se cache pour le moment derrière les experts. «Beaucoup de questions doivent encore être étudiées», élude Ueli Locher, responsable du dossier à l'Office fédéral de la santé publique (OFSP). Le gouvernement ne rendra qu'en mars prochain sa mouture finale de révision de la loi sur les stupéfiants.

 

«Souci de cohérence»

Mais pourquoi s'acharner à contrôler le marché? «Par souci de cohérence», répond Philipe Lehmann, chef du service interventions drogues à l'OFSP. «On ne peut pas forcer un consommateur, désormais autorisé, à fréquenter des réseaux illégaux pour s'approvisionner.» «Cela reviendrait à renforcer le marché noir», poursuit François Reusser, président de la Coordination suisse du chanvre.

Il y a une autre raison. La culture et la vente de chanvre ont connu un fort développement en Suisse ces dernières années. «On estime que près de cent tonnes de drogues douces sont consommées chaque année chez nous, avance François Reusser. Et la production indigène couvre peut-être la moitié des besoins.» Et encore, ces chiffres ne tiennent pas compte de l'incroyable développement de la culture individuelle. Pire: selon certains experts, la Suisse serait devenue un des plus gros exportateurs européens de chanvre. Et la loi n'a rien pu y faire.

 

Restreindre l'accès

La politique prohibitionniste ayant échoué, les autorités sont prêtes à admettre qu'il est plus sain dès lors d'avoir un oeil sur ce marché. C'est le principe d'opportunité, qui consiste non pas à légaliser, mais à tolérer. Elles pourront ainsi maîtriser la qualité des produits, au même titre qu'elles limitent le degré d'alcool. Elles pourront surtout en restreindre l'accès, notamment aux jeunes.

«En contrôlant ce secteur, nous pourrons ainsi le limiter», conclut Philippe Lehmann. Par la même occasion, on espère casser les reins au marché noir. Le gouvernement suit en fait les principales options dessinées il y a une année par un groupe d'experts réunis dans la Commission fédérale pour les questions liées aux drogues. Leurs recommandations ont d'ailleurs reçu un accueil assez favorable auprès des cantons.

Outre les conflits idéologiques qu'induit une telle politique, il reste encore d'épineuses questions à régler. Par exemple, comment éviter de transformer la Suisse en une plaque tournante du cannabis, exportant à tout-va et attirant un tourisme de la drogue?

Pour ce faire, il est question de limiter la production en fonction de la demande indigène. «En se basant sur un maximum de cinq grammes par consommateur et par jour, on pourrait déterminer l'offre globale», propose François Reusser. L'obligation pour l'acheteur de fournir ses papiers d'identité permettrait aussi de circonscrire la vente à des adultes résidents en Suisse. La publicité sera sans doute interdite. Enfin, il est probable qu'on réserve ce marché aux magasins spécialisés. Ce genre de dispositif est bien connu à la Régie fédérale des alcools, comme le confirme son directeur Lucien Erard. «Ce n'est pas une affaire très compliquée. Nous aurions les compétences pour le faire.»

Convoitises

Mais l'arrivée du chanvre dans un univers régulé va aussi poser de simples questions économiques. Car il attisera des convoitises. Bernard Rappaz, cultivateur de chanvre de Saxon, estime à plus d'un milliard de francs le chiffre d'affaires en Suisse. «C'est une solution d'avenir pour une agriculture qui a peu de perspective, estime le Valaisan. Les surplus viticoles pourraient être compensés par le chanvre. Mais il faudra pour cela que les producteurs puissent conserver des marges suffisantes.» Faudra-t-il alors fixer les prix du cannabis? La question est ouverte. Comme d'autres encore: faudra-t-il autoriser les cigarettiers à s'implanter sur ce marché. Et pourra-t-on un jour introduire une taxe sur le joint?

 

 


En Europe, c'est le règne de la cacophonie
 
 

De la France conservatrice à la Hollande libérale

En Europe, c'est le règne de la cacophonie lorsqu'il s'agit de réprimer ou non le trafic de cannabis. La France demeure l'Etat le plus répressif en la matière. Aux effluves de chanvre, notre voisin préfère nettement ceux du pastis! La loi française sur les stupéfiants, qui remonte au 31 décembre 1970, prévoit une peine maximale de vingt ans d'emprisonnement pour les trafiquants, ce texte n'opérant aucune distinction entre drogues dures et drogues douces.

Mais la tendance actuelle conduit la plupart des Etats vers une prudente libéralisation. La Suisse s'apprête donc à rejoindre des nations comme les Pays-Bas et l'Espagne qui ont dépénalisé la consommation des joints de hasch ou de marijuana. L'Allemagne semble prendre une voie semblable, de même que l'Italie et, depuis peu, le Royaume-Uni. Ces nations renoncent, en règle générale, à poursuivre les consommateurs tout en conservant un arsenal pénal pour réprimer les trafiquants importants de cannabis.

Les Pays-Bas mènent depuis plusieurs années une politique pragmatique qui plaît en Suisse, surtout de l'autre côté de la Sarine. Amsterdam est réputée pour ses «coffee-shops» bistrots où l'on trouve plus d'herbes à fumer que de café à boire. Toutefois, la police néerlandaise les surveille et la loi de ce pays prescrit les limites suivantes: la vente supérieure à 5 grammes de cannabis à la fois et à une même personne est interdite, de même que l'approvisionnement à des mineurs (moins de 18 ans); aucune publicité n'est acceptée; la vente des drogues dures est passible de la prison.

La dépénalisation semble donc dans l'air du temps. Mais il faut bien admettre que cette politique contredit plusieurs textes internationaux dont la Convention dite «de Vienne» prise en 1988 par les Nations Unies. Elle demande aux Etats signataires de réprimer le trafic de cannabis à la même enseigne que les autres drogues. Dès lors, il est probable que ces conventions seront, un jour ou l'autre, corrigées.

 

Jean-Noël Cuénod

 

 

 
 
Dépénalisation de la fumette En Europe, c'est le règne de la cacophonie
 
 
 
 

 

Le chanvre suisse couvre la demande

CHRJSTIAN BERNET

 

 

La Suisse n’aura pas besoin d’un

plan Wahlen pour le cannabis.

 

Après avoir quasiment disparue à la

fin de la dernière guerre, sa culture

fait un retour en force dans nos

campagnes et devient moins exo-

tique que le kiwi ou la grany smith.

De un hectare en 1993, on serait

passé à plus de 300 hectares culti-

vés en 1998, selon des estimations

de l’Office fédéral de l’agriculture.

La Suisse est devenue ainsi le pre-

mier producteur européen avec les

Pays-Bas et se profile désonnais

comme exportateur. Selon un com-

missaire de la police fédérale, la

production suisse serait suffisante

pour couvrir la demande indigène

en stupéfiants.

Tout le chanvre cultivé en Suisse

n’est toutefois pas destiné à ce mar-

ché. Une partie de la production va

à la fabrication de textile, d’huile ou

de papier. Au titre de "matière pre-

mière renouvelable", ces cultures

reçoivent même des paiements di-

rects à hauteur de 1500 francs

l’hectare. Ce chanvre ayant une

faible concentration (0,3%) de

THC, la substance psycho-active, an

culture est autorisée. En 1999,

34 hectares ont bénéficié de ces

subventions.

La destination du reste de la pro-

duction n’est pas déclarée. Il ne fait

guèm de doute que la majeure par-

tie est réservée à la "fumette". Et ce

cannabis illégal trouve un débou-

ché facile dans les magasins de

chanvre. Ceux-ci ont essaimé prin-

cipalement dans les villes de Zu-

rich, Bile, Saint-Gafl et Berne, mais

peu en Suisse romande, lly en au-

rait plus de 200 dans le pays.

Ces "Hanflàdeli", comme on les

appelie outre-Sarine, profitent de

l’ambiguïté de la loi qui n’interdit

que la vente de cannabis à usage de

stupéfiant L’herbe est donc vendue

sous forme de "sachets" ou de

"coussins odorants". On trouve

même des "Hanfthaler", sorte de

médaillons de haschisch qui n’ont

de décoratif que le nom. La teneur

en THC de ces produits atteint par-

fois 10%.

En 1998, on estime que le mar-

ché du chanvre en Suisse a généré

pour 300 millions de chiffre d’af~

faires. Les quatre cinquièmes pro-

viendraient du marché gris de la

drogue.

Filière d’expoitation

L’émergence de ce marché à dé-

couvert s’est fait aux dépens du tra-

fic traditionnel. Du coup, le "dealer"

qui attend le client au coin de

la rue est en voie de disparition. On

estime qu’en Suisse, 80% du mar-

ché s’est déplacé dans les boutiques

ou se fait entre connaissances (oofr

le graphique ci-dessus). Dans cer-

tains cantons comme le Tessin, la

vente dans la rue a disparu. Ce dé-

veloppement est moins fort dans les

cantons romands où les magasins

de chanvre y sont moins nombreux.

L’importation de haschisch n’a

pas pour autant disparu. il y a des

adeptes de l’afghan ou duLihbanais.

Comme la rue n’a plus la cote, il est

probable que la distribution se soit

orientée en partie vers les magasins

de chanvre. Ce qui semble beau-

coup inquiéter la police et les

douanes, c’est désormais l’exporta-

tion du chanvre suisse à destination

d’autres pays européens. Selon un

commissaire de la police fédérale,

des filières seraient déjà en place.

 

 

 

Le chanvre suisse couvre la demande

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La Suisse n’aura pas besoin d’un plan Wahlen pour le cannabis.

Après avoir quasiment disparue à la fin de la dernière guerre, sa culture

fait un retour en force dans nos

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