DÉPÉNALISATION DU CANNABIS  

Le joint bientôt libre

 

Photo une

Fumer du hasch ne devrait plus être un délit.

Mais pas avant 2002 ou 2003,

pour autant que le Parlement accepte le projet du gouvernement.

 
DROGUE. Le Conseil fédéral rend publiques les grandes options de la future loi sur les stupéfiants. Il renonce, notamment, à y incorporer le tabac et l'alcool. La gestion du marché gris du chanvre demeure sensible.  

Plus consensuel que courageux....

 


La formule suisse en matière de drogue peut se résumer à un savant louvoiement entre courage et recherche du consensus. Le Conseil fédéral suit cette règle pour réviser la loi sur les stupéfiants, avec une préférence marquée pour le consensus.
Un avantage de cette approche est illustré par l'histoire de la prescription d'héroïne. Hier encore idée sulfureuse, puis projet expérimental très débattu, ce mode de traitement est devenu, à force de petits pas, si bien accepté que son ancrage définitif dans la loi n'a pratiquement pas soulevé d'opposition au cours de la procédure de consultation.
Cette stratégie comporte malheureusement aussi le risque d'avancer trop lentement, un risque qui s'est déjà concrétisé s'agissant du cannabis. La réalité dans ce domaine a dépassé la loi depuis longtemps. Le Conseil fédéral en prend acte quand il annonce qu'il va renoncer à pénaliser la consommation de cette drogue. Mais cette seule mesure ne résoudra pas ce qui est devenu aujourd'hui le problème central: l'existence d'une économie du chanvre visible, florissante et majoritairement illégale. Réglementer cette économie comporterait certes des risques de frictions, voire d'isolement sur la scène internationale. Il n'est pas sûr toutefois qu'il existe, aujourd'hui, d'autre voie politiquement acceptable sur le plan intérieur.

Sylvie Arsever LE TEMPS

 

 

 

 
 

Le Conseil fédéral veut légaliser le cannabis

LOI A RÉVISER Nos sept Sages sont prêts à dépénaliser la consommation de haschisch et de marijuana. Le Parlement tranchera. Mais quand?

Dans le cadre de la révision de la loi sur les stupéfiants, le Conseil fédéral a décidé hier de dépénaliser la consommation de cannabis et ses actes préparatoires. Les sept Sages n'ont pas agi sur un coup de tête: les deux tiers des cantons (à l'exception notable du Valais) souhaitent ce premier pas vers la libéralisation totale. Cette décision va susciter certaines craintes, comme le montrera la future bataille au Parlement, dont l'approbation est encore nécessaire.

 

La consommation de cannabis sera légale. Mais pour la vente, Berne hésite encore
Sylvie Arsever
Mardi 3 octobre 2000


Un an après avoir ouvert une large consultation sur les modifications à apporter à la loi fédérale sur les stupéfiants (LFS), le Conseil fédéral esquisse – prudemment – la direction dans laquelle il entend s'engager. Un seul point est clairement acquis: acheter et consommer du haschisch ou de la marijuana doit cesser d'être punissable. Pour le reste, la souplesse prévaut. Le Conseil fédéral entend se réserver la possibilité de prévoir par voie d'ordonnance une dépénalisation partielle de la consommation des autres drogues. En outre, il étudiera une solution du même type lui permettant d'autoriser dans certains cas la production et la vente de cannabis. Avant de se lancer sur cette seconde voie toutefois, il veut s'assurer qu'elle est compatible avec les engagements internationaux de la Suisse et ne risque pas de nous brouiller avec nos voisins moins libéraux.
Comme toute la politique suisse de la drogue, la révision de la LFS s'engage sous le signe du compromis: «Le Conseil fédéral, résume Ueli Locher, chef de la division dépendances et sida à l'Office fédéral de la santé publique, a retenu les réformes dont la consultation a montré qu'elles seraient bien acceptées.» La pénalisation de la consommation de cannabis, ainsi, n'avait pratiquement plus de supporters hors de l'UDC et du réduit romand constitué autour des cantons de Vaud, Neuchâtel et du Valais. Il aurait donc été très surprenant que le Conseil fédéral renonce à une proposition de dépénalisation qu'il avait lui-même mise en avant. A l'opposé, le projet d'étendre les dispositions visant la prévention et la thérapie des stupéfiants à tous les «produits créant la dépendance», c'est-à-dire notamment au tabac et à l'alcool a suscité une véritable levée de boucliers dans tous les milieux qui, des agriculteurs aux hôteliers en passant par les cafetiers restaurateurs, les brasseurs, les publicitaires et les détaillants, en tirent directement ou indirectement des revenus. Aussi le gouvernement renonce-t-il à persévérer dans cette voie...
Pour le reste, les avis étaient plus partagés et le suspense, en conséquence, continue. Actuellement, le fait de consommer une drogue illégale est punissable de l'amende ou d'un maximum de 3 mois de prison. Une majorité s'est dégagée, en consultation, pour changer cet état de choses mais sans choix clair entre deux possibilités: retirer la consommation des comportements punissables, ce que recommandent tous les experts mandatés par Berne depuis plus de dix ans. Ou permettre au Conseil fédéral de renoncer par voie d'ordonnance à la poursuite de certains comportements limités – par exemple la consommation en privé par des personnes dépendantes. C'est cette deuxième voie qui est retenue avec un souci: éviter que les dealers n'en profitent pour échapper aux poursuites en ne transportant que de petites quantités de drogue.
Prescription d'héroïne ancrée dans la loi
Les choses sont plus compliquées encore pour le point le plus sensible de la future modification législative: celui du sort à réserver au marché gris du chanvre qui fleurit depuis plusieurs années en Suisse. La proposition la plus audacieuse consistait à permettre au Conseil fédéral de renoncer à poursuivre la vente sans publicité de petites quantités de cannabis à des personnes majeures et à autoriser, en amont, les cultures débouchant sur ce type de commerce. Elle avait l'appui d'une majorité de cantons mais de seulement deux partis gouvernementaux – les socialistes et les radicaux. C'est logiquement le point sur lequel le gouvernement se montre le plus circonspect. Il faut dire que c'est également celui qui poserait, en cas d'application, le plus grand nombre de problèmes pratiques. Une telle façon de faire est-elle vraiment compatible avec l'engagement pris par la Suisse de respecter des conventions internationales qui font, à tort ou à raison, du cannabis un stupéfiant comme un autre? Comment éviter un tourisme de la drogue? ou des exportations massives vers les pays qui nous entourent? Sur tous ces points, les sept Sages demandent donc des précisions avant de s'engager plus avant dans ce qui pourrait être une version helvétique de l'«expérience hollandaise.» En revanche, ils ont accepté sans tousser d'ancrer définitivement la prescription d'héroïne dans la loi et de consacrer le leadership fédéral en matière de prévention et de traitement.


Plus consensuel que courageux

Sylvie Arsever

La formule suisse en matière de drogue peut se résumer à un savant louvoiement entre courage et recherche du consensus. Le Conseil fédéral suit cette règle pour réviser la loi sur les stupéfiants, avec une préférence marquée pour le consensus. Un avantage de cette approche est illustré par l'histoire de la prescription d'héroïne. Hier encore idée sulfureuse, puis projet expérimental très débattu, ce mode de traitement est devenu, à force de petits pas, si bien accepté que son ancrage définitif dans la loi n'a pratiquement pas soulevé d'opposition au cours de la procédure de consultation. Cette stratégie comporte malheureusement aussi le risque d'avancer trop lentement, un risque qui s'est déjà concrétisé s'agissant du cannabis. La réalité dans ce domaine a dépassé la loi depuis longtemps. Le Conseil fédéral en prend acte quand il annonce qu'il va renoncer à pénaliser la consommation de cette drogue. Mais cette seule mesure ne résoudra pas ce qui est devenu aujourd'hui le problème central: l'existence d'une économie du chanvre visible, florissante et majoritairement illégale. Réglementer cette économie comporterait certes des risques de frictions, voire d'isolement sur la scène internationale. Il n'est pas sûr toutefois qu'il existe, aujourd'hui, d'autre voie politiquement acceptable sur le plan intérieur.

 

Cannabis
Ruth Dreifuss libère,
sans perdre de vue alcool et tabac

Loi sur les stupéfiants: seule la consommation de cannabis est visée. Pour la culture et le commerce, comme pour d autres drogues, l interdiction sera maintenue, mais, parfois, on renoncera à punir.

De Berne: Georges Plomb*

Cannabis outragé! Cannabis vilipendé! Cannabis libéré! L innovation majeure de la loi révisée sur les stupéfiants, la voilà. Le Conseil fédéral en a tranché hier. La libéralisation touchera la consommation et ses actes préparatoires. Mais elle s accompagnera de mesures de prévention et en faveur de la jeunesse. Un groupe de travail est à pied d oeuvre pour cela. Le tout sera publié avant la session de mars 2001 du Parlement. C est Ruth Dreifuss, cheffe du Département de l Intérieur, qui mène le jeu.
Attention! Le Conseil fédéral est décidé à punir plus sévèrement les adultes qui inciteraient les jeunes à consommer du cannabis. Une autre question sera de fixer la limite d âge. Cela devrait se jouer entre 16 et 18 ans.

Culture et commerce: suspense

Par contraste, le gouvernement hésite à desserrer la vis sur le front de la culture du chanvre, de la fabrication et du commerce des produits du cannabis (haschisch et marijuana). Il en décidera lors de l adoption du projet au Parlement. Ainsi, on pourrait maintenir l interdiction, mais on renoncerait à toute sanction dans certains cas (principe d «opportunité»). Le Conseil fédéral, en revanche, luttera sans faiblesse contre l exportation de produits du cannabis, contre le «tourisme de la drogue», contre un certain «marché gris» qui sévit. Le gouvernement sera moins coulant pour les autres drogues. Leur consommation restera punissable. Mais, là aussi, l exécutif se réservera le droit de déterminer les cas où l on renoncera à une poursuite pénale.

Vin et tabac épargnés

Faut-il introduire dans la loi d autres substances «engendrant la dépendance» que les stupéfiants et les médicaments psychotropes comme, par exemple, le vin et le tabac? Le Conseil fédéral, face à la résistance en consultation, y renonce. Il renonce aussi à y inscrire l expression même de «substance engendrant la dépendance». Mais Ruth Dreifuss pourrait revenir à la charge dans d autres lois comme celle sur les produits alimentaires. Le Gouvernement est aussi décidé à renforcer la prévention, la thérapie et la réduction des risques, que les substances soient légales ou illégales.


Non, la consommation de cannabis ne sera pas libéralisée par anticipation. Ni Ruth Dreifuss (Intérieur) ni Ruth Metzler (Justice et Police) n y sont favorables  même si certaines autorités sont parfois désorientées par la tournure des événements. Tant que la loi interdira, elles devront sévir. La démocrate-chrétienne Ruth Metzler, lors de sa campagne pour l élection au Conseil fédéral, fut une ardente promotrice de la libéralisation du cannabis. Cela lui valut de recevoir, cadeau du socialiste vaudois Pierre Chiffelle, une plante de chanvre! Ruth Dreifuss, socialiste comme Chiffelle, est plus tiède. Répondant à un journaliste, elle affirme non seulement ne pas vouloir fumer de cannabis, mais, rapportant les propos de son neveu, elle rappelle, qu avec ça, on peut «se péter».

Héroïne confirmée

La loi révisée, enfin, confirmera les prescriptions médicales d héroïne, ancrera les quatre piliers de prévention, de thérapie, de réduction des risques et de répression en matière de drogue, consolidera le rôle directeur du pouvoir fédéral.

GPB

* La Liberté

 

 

Cannabis Ruth Dreifuss libère, sans perdre de vue alcool et tabac Loi sur les stupéfiants: seule la consommation de cannabis est visée.

Pour la culture et le commerce, comme pour d’autres drogues, l’interdiction sera maintenue, mais, parfois, on renoncera à punir. De Berne: Georges Plomb*

Cannabis outragé! Cannabis vilipendé! Cannabis libéré!

L’innovation majeure de la loi révisée sur les stupéfiants, la voilà. Le Conseil fédéral en a tranché hier. La libéralisation touchera la consommation et ses actes préparatoires. Mais elle s’accompagnera de mesures de prévention et en faveur de la jeunesse. Un groupe de travail est à pied d’oeuvre pour cela. Le tout sera publié avant la session de mars 2001 du Parlement. C’est Ruth Dreifuss, cheffe du Département de l’Intérieur, qui mène le jeu. Attention! Le Conseil fédéral est décidé à punir plus sévèrement les adultes qui inciteraient les jeunes à consommer du cannabis. Une autre question sera de fixer la limite d’âge. Cela devrait se jouer entre 16 et 18 ans. Culture et commerce: supsense Par contraste, le gouvernement hésite à desserrer la vis sur le front de la culture du chanvre, de la fabrication et du commerce des produits du cannabis (haschisch et marijuana). Il en décidera lors de l’adoption du projet au Parlement. Ainsi, on pourrait maintenir l’interdiction, mais on renoncerait à toute sanction dans certains cas (principe d’«opportunité»). Le Conseil fédéral, en revanche, luttera sans faiblesse contre l’exportation de produits du cannabis, contre le «tourisme de la drogue», contre un certain «marché gris» qui sévit. Le gouvernement sera moins coulant pour les autres drogues. Leur consommation restera punissable. Mais, là aussi, l’exécutif se réservera le droit de déterminer les cas où l’on renoncera à une poursuite pénale. Vin et tabac épargnés Faut-il introduire dans la loi d’autres substances «engendrant la dépendance» que les stupéfiants et les médicaments psychotropes comme, par exemple, le vin et le tabac? Le Conseil fédéral, face à la résistance en consultation, y renonce. Il renonce aussi à y inscrire l’expression même de «substance engendrant la dépendance». Mais Ruth Dreifuss pourrait revenir à la charge dans d’autres lois comme celle sur les produits alimentaires. Le Gouvernement est aussi décidé à renforcer la prévention, la thérapie et la réduction des risques, que les substances soient légales ou illégales. Non, la consommation de cannabis ne sera pas libéralisée par anticipation. Ni Ruth Dreifuss (Intérieur) ni Ruth Metzler (Justice et Police) n’y sont favorables – même si certaines autorités sont parfois désorientées par la tournure des événements. Tant que la loi interdira, elles devront sévir. La démocrate-chrétienne Ruth Metzler, lors de sa campagne pour l’élection au Conseil fédéral, fut une ardente promotrice de la libéralisation du cannabis. Cela lui valut de recevoir, cadeau du socialiste vaudois Pierre Chiffelle, une plante de chanvre! Ruth Dreifuss, socialiste comme Chiffelle, est plus tiède. Répondant à un journaliste, elle affirme non seulement ne pas vouloir fumer de cannabis, mais, rapportant les propos de son neveu, elle rappelle, qu’avec ça, on peut «se péter». Héroïne confirmée La loi révisée, enfin, confirmera les prescriptions médicales d’héroïne, ancrera les quatre piliers de prévention, de thérapie, de réduction des risques et de répression en matière de drogue, consolidera le rôle directeur du pouvoir fédéral. GPB * La Liberté

 
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Suisse

Stupéfiant signal


Par Raymond Gremaud
Typique! Le Conseil fédéral abandonne sa lutte répressive contre la consommation de cannabis et il renforce simultanément son combat contre la consommation de tabac qui reste un produit légal. A se demander si cette hargne contre le tabac, partagée avec l'Organisation mondiale de la santé, n'est pas destinée à couvrir une tolérance helvétique pour les stupéfiants qui irrite fort la communauté internationale.
En se prononçant pour une dépénalisation générale de la consommation de cannabis avant même de régler de manière adéquate les questions de la culture et du commerce de cette substance, Ruth Dreifuss donne un bien étrange signal pour une responsable de la Santé publique. Il est facile de confier à la police et aux juges le devoir de continuer à faire appliquer la loi actuelle. Mais de quelle crédibilité disposent donc ces autorités, si la Berne fédérale leur chante sur tous les tons que la dépénalisation est programmée?
Sa petite-nièce le lui a dit: «On peut être vraiment pété après un joint.» Ruth Dreifuss sait donc qu'elle confère le champ libre à un produit qui n'est pas innocent. Pourtant, ce pas-là ne semble pas lui suffire. Elle demande encore à pouvoir renoncer à la poursuite pénale et à la pénalisation du consommateur pour d'autres stupéfiants. C'est ce qu'elle appelle le principe d'opportunité.
Le Parlement avalera-t-il une telle couleuvre? Selon Ruth Dreifuss, les deux tiers des cantons et organisations consultés sont favorables à son projet. En fait 17 cantons sont contre la dépénalisation proposée et les partis gouvernementaux sont divisés: PS et radicaux pour, UDC et PDC contre. Cela promet une bataille mémorable en tout cas à la Chambre des cantons et, si d'aventure la révision y obtenait le feu vert, un retentissant référendum.
Personne ne conteste que la dépénalisation des drogues est un thème d'actualité.
De là à jouer cavalier seul par rapport à nos voisins européens, il y a un pas impossible à franchir, sauf à admettre le tourisme de la drogue et développement du crime organisé. Les lénifiantes assurances de Ruth Deifuss en la matière n'y changent hélas rien. Citoyennes et citoyens sont donc invités à réfléchir sur le stupéfiant signal donné par la Berne fédérale. R. G.
POINT DE VUE

 
 
 
 
 
   
   
   
   
   
   
   

 

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